Ce n’est pas une surprise de voir débarquer un film comme celui-ci en 2009, étant donné la diversité spectaculaire de la filmographie d’Herman Yau, de ses réalisations déviantes jusqu’à celles plus ancrées dans une réalité sociale après le bouleversement post-rétrocession. Un peu comme son diptyque sur l’univers de la prostitution ou encore ce film-ci, au titre et à l’affiche aussi improbables que trompeurs. Ne vous y fiez aucunement, le plus intéressant n’est pas la manière dont le film est étrangement vendu, mais plutôt son contenu débordant d’idées farfelues et de séquences à l’humour impénétrable, voir affligeant si l’on ne s’est pas familiarisé avec la comédie made in HK après une cure de cinq bonnes années (traitement minimum recommandé).
Car ce qui se déroule dans Split Second Murders, hormis ses scènes où l’on vomit et où l’on urine sur son voisin lors d’une soirée en nightclub bien arrosée, semble être sorti d’un imaginaire pas tout à fait stable, qui se ficherait des codes conventionnels du cinéma impliquant une rigueur dans le scénario, l’interprétation et la mise en scène pour ne pas être taxé de fou allié. Bien que le cinéma d’Herman Yau semble s’être assagi avec le temps, ses films semblent encore marqués par une violence déréglée, un déséquilibre total entre normalité et déviance qui sert pourtant un film d’apparence accessible et grand public. Il est question d’imaginaire, de narration immédiate, et l’univers mis en place n’est ni glauque ni fantastique : nous sommes à Hongkong, en compagnie de Luk, un dessinateur et scénariste geek qui vient de se faire larguer par sa nana alors qu’ils allaient fêter la longévité de leur couple. Entre hurlements et grimaces un peu bébêtes, le client du cinéma d’Herman Yau n’est pas déboussolé par le coup, le film délimite déjà le terrain entre thriller classique qui aurait écopé d’une Cat III, et film plus grand public, moins déviant. Pourtant l’essentiel n’est pas là. Herman Yau va utiliser le prétexte du remaniement du scénario d’un type pourtant fier de son travail pour laisser libre cours à son imagination et ses revendications. Et en dehors de son aspect purement délirant et pas –ou peu- soucieux des normes au cinéma, Split Second Murders questionne le statut d’artiste et de cinéaste dans une industrie qui ne demande que du sexe et de la violence pour fonctionner. En gros, le vieux de la vieille ou le jeune premier est légitimé à partir du moment où il filme au moins une scène de meurtre. Au départ inoffensif, le scénario du jeune homme va alors prendre une tournure totalement différente pour plaire à son recruteur potentiel. Et à Herman Yau de sévir une nouvelle fois.
Pourtant, la logique du récent cinéma de l’ex-enfant terrible d’Hongkong semble aller dans le sens inverse du message véhiculé ici : filmer autre chose que du thriller est possible, et il l’a déjà démontré, ne pas filmer la violence l’est tout autant. On se rappelle entre autre de ses films « sociaux » qui n’impliquaient pas forcément le meurtre ou n’autorisaient pas une violence purement fictionnelle. La violence ici n’est qu’imaginaire, la trame principale se soustrait à cette violence obligatoire, tout passant par le récit imprévu du jeune dessinateur obligé de remodeler son récit pour être embauché, des idées qui lui viendront après avoir passé une journée particulièrement mouvementée. Cette violence sera ainsi traitée avec un ton particulièrement léger et amusant, en témoigne cette scène de ménage incroyable et délirante entre deux couples bourgeois où l’on se sert de baguettes pour poignarder son ami et où la bouffe valse à tout-va. Une violence filmée qui découle de l’imaginaire de Luk, et qui pour le coup, n’implique aucun coup de feu à l’écran. D’où cette vision très intéressante et une remise en question permanente, un peu brouillonne car n’oublions pas que l’histoire qui se déroule sous nos yeux est improvisée, des codes du cinéma de Hongkong. Bien que Split Second Murders ne révolutionne pas le cinéma, son énergie communicative et son absence de sens le rendent forcément intéressant, surtout lorsque l’on suit de près la filmographie d’Herman Yau. Bien décidé à continuer de tourner des films à très petit budget (malgré la présence ici d’une caméra Scope), la récente contribution d’Herman Yau au cinéma hongkongais porte ses fruits puisque décalée, hystérique et qui sous ses faux airs de cinéma grand public, renferme une rage et une envie de foutre le feu (un type s’immole dans une séquence, par exemple) évidentes.
Pas accroché plus que ça à cette comédie signée Herman YAU. Certes il n'a jamais brillé dans ce style (à moins de considérer EBOLA SYNDROME comme comédie) et ce n'est pas SPLIT SECOND MURDER qui changera la donne, sa meilleure intrusion dans le genre étant peut être HERBAL TEA (comédie romantique).Ca reste regardable, on voit bien pire que ça sortir tous les ans, mais pour moi c'est vraiment pas mémorable, tout juste passable.