Un film calibré pour le box-office estival mais restant sympathique
Dans un village de la côte taïwanaise, Aga se motive tant bien que mal à distribuer le courrier tous les jours. Lui qui rêvait de devenir chanteur dans un groupe de rock, la réalité l'a vite rattrapé en le plongeant dans l'ennui quotidien. Pourtant, deux événements indépendants vont remettre un peu de sel dans sa vie. En ouvrant une enveloppe dont il n'a pas trouvé la destinataire, il découvre une lettre d'amour écrite il y a soixante ans, décrivant le voyage vers le Japon d'un homme laissant sur l'île sa bien-aimée. Puis vient la tenue d'un concert de rock japonais organisé par le maire de la localité. Ce dernier reçoit de nombreuses protestations, argumentant qu'un groupe régional pourrait tout aussi bien convenir. Seul problème: un tel groupe n'existe pas. Pas encore. Le défi est relevé, et la mairie organise une audition publique pour recruter les futurs membres de ce groupe, sous l'égide de l'impresario du groupe, venue du Japon pour y retrouver également de sa famille.
Le scénario bien tarabiscoté et pourtant constitué de poncifs du genre ne doit pas effrayer le spectateur, car bien loin d'une grande production, c'est la petite folie influencée par le cadre unique qui procure tout l'intérêt nécessaire. Suivant le schéma classique du groupe de personnes se lançant dans une entreprise totalement incongrue et bien souvent en décalage avec leur nature, on est une fois de plus pris au jeu grâce à la bonne humeur ambiante. La correspondance romantique, avec sa symétrie un peu lourde malgré sa réalisation presque caricaturale, ne parvient pas a gâcher le plaisir qu'on a à retrouver les différents membres du groupe, venant tous d'un milieu (ou d'une génération) différente. Et tout d'un coup, sans qu'on s'en soit rendu compte, on arrive au concert, et un grand moment bien sentimental et entendu nous conclut ce film du happy-end tant attendu.
Music of my heart
Plus gros succès du box-office taïwanais de tous les temps, "Cape N° 7" n'est finalement rien d'autre qu'une comédie "feel-good" brodé sur le schéma ultra rabattu du groupe de musicos pas vraiment fait pour jouer ensemble.
Soit un joueur de batterie, amoureux de la femme de son patron; un vendeur de vin (la marque fictive "Malasun", que les producteurs se sont empressés de lancer sur le marché après le carton phénoménal du film) bassiste dans l'âme; une gamine au synthé adepte des gros mots et Old Mao, ancienne star déchue plus vraiment dans le coup. Tous vont donc soutenir Aga, un jeune musicos pas trop bégueule, qui peine à donner suite à un premier succès surprise et qui manque singulièrement de confiance en lui-même. Bref, une avalanche de personnages plus ou moins bien écrits, auxquels toute l'audience pourra s'identifier. Le tout saupoudré d'une belle histoire d'amour entre le bellâtre Aga et une jeune japonaise venue surveiller les "progrès" de ses jeunes poulains censés assurer la première partie d'un concert exceptionnel donné par un musicien célèbre.
On est donc en plein territoire d'un genre ultra-rabattu dans le cinéma asiatique, mais qui fait toujours plaisir à voir; sauf qu'après une première partie assez jouissive, le scénario décide d'emprunter la voie de la comédie romantique ultra balourde, surtout que l'actrice Tanaka Chie ("Ping Pong", "Initial D") en fait des tonnes dans le rôle de l'insupportable manageuse japonaise venue superviser le bon déroulement des répétitions. Ajoutez à cela une intrigue romantique secondaire censée se dérouler quelques décennies en amont et qui décantera l'intrigue principale à la dernière seconde avec une dénouement totalement tiré par les cheveux et vous obtiendrez un franc divertissement populaire, dont le succès semble logique dans son pays d'origine (toutes les formules à succès à pulluler dans les soap opéras TV taïwanais sont réunis, sans parler d'idéologies utopistes politiques, dont le rapprochement largement entériné entre japs et taïwanais / chinois), mais qui peinera à passionner les foules au-delà de ses frontières (sauf peut-être dans quelques pays asiatiques, où comédie musicale et romantique font généralement bon ménage).
Au moins ce film vient-il confirmer l'exceptionnelle nouvelle vitalité dont semble faire preuve le cinéma taïwanais depuis deux-trois ans après les succès de "Formula 17" de Ying-Rong Chen, "Eternal Summer" de Leste Chen ou encore le documentaire "Flyin' Boys" de Lin Yu-hsien…