| Chris | 4.75  |
Un film monumental trop méconnu |
Non, David Chiang n'a pas été enterré avec Bruce Lee. Non, David Chiang n'a pas tourné qu'avec Chang Cheh. Non, David Chiang n'a pas oeuvré que dans des wu xia pian aussi désespérés qu'ambigus. A ceux également qui croient qu'il n'a tourné majoritairement que dans des navets, voici ce Lutte féroce à Shaolin.
Revoici donc le James Dean chinois, comme certains l'aiment à le nommer, dans un film qui ne figure pas toujours dans sa filmo, mais qui est loin d'être mineur. En effet, loin des standards encore vivaces à l'époque (imposer un full hero capable de prendre la relève du Dieu), et même s'il prouve qu'il est bien l'un des plus charismatiques, ce film de kung-fu ne cherche pas à l'imposer à tout prix. Et rien que ça, déjà, ça fait terriblement plaisir !
S'il n'est pas réalisé par une mega-star dont le style transcende les décennies encore aujourd'hui (besoin d'exemples ?), le film dispose néanmoins (atout non négligeable) d'un script extrêmement puissant ("pour une fois" aimerait-on même dire pour souligner le propos). Les personnages sont tous hautement intéressants et forment tous des piliers de cette kung-fu story finalement assez peu banale.
Il en résulte -ô surprise- que le personnage de Lin Khan-Tao (joué par le Jimmy de service) ne sera pas forcément le chouchou de tout le monde. Chacun pourra ainsi avoir son favori dans cette belle brochette de guerriers et guerrières ayant tous une technique de combat particulière et redoutable : que ce soit Chiun et ses coups du tigre, l'inspecteur et ses jambes terriblement redoutables, maître Pai-Hen et sa brutalité hors du commun (interprété par le grand Michael Chan qui trouve là un rôle à la mesure de son immense talent autrement plus consistant que le rôle de zinzin qu'il tient dans Chocolate inspector), le tatoueur et son agileté phénoménale ou ces jeunes donzelles au charme vénéneux, David Chiang partage sans sourciller la vedette avec eux.
Faisant la part belle aux trahisons, aux alliances, aux combats à un contre un, à un contre cent, à des assauts à cent contre cent, on obtient là un putain d'excellent film d'aventures, où les techniques de combat sont monstrueusement efficaces, et les protagonistes aussi roublards que sans pitié.
De ce fait, il se trouve même être meilleur que les célébrissimes fleurons du genre même s'il dispose d'une qualité plastique assez discutable et même s'il ne se prête pas du tout au jeu de l'analyse. Alors que Sammo Hung par exemple construit des chefs-d'oeuvre à partir de scénarios zéro, ici l'intrigue tortueuse et passionnante et une galerie quasi-inédite de personnages hauts en couleurs -ainsi que des combats et des combattants véritables qui n'usent pas d'artifices vus et revus pour faire croire que ...- hissent ce film vers un niveau tellement haut, qu'on rêverait encore de voir un véritable remake ou une suite réalisée par un Gordon Chan ou un Liu Chia-Liang, qui mettrait enfin de l'ordre dans les classements des meilleurs films de l'univers...
