Un film-noir de Chu Yuan, pas vraiment convaincant...
Chu Yuan n'a pas fait que dans le wu xia pian, la preuve avec ce Big Hold-Up, sorte de faux polar tendant à mettre en avant les états d'âmes d'une bande de malfrats finalement pas si mauvais.
L'histoire : Un gang formé d'une ex-star du cinéma kung-fu (Chen Kuan-Tai), d'un ancien pilote automobile dont l'épouse est atteinte d'une maladie incurable, d'un jeune rebelle fauché (Danny Lee), ainsi qu'un jeune homme (Yueh Hua) qui souhaite payer les dettes que son frère toxicomane doit à une triade, dérobe l'argent d'un convoyeur de fond. Ils confient le fruit de leur larcin au meneur de la bande et décident d'aller se réfugier à l'étranger le temps que l'affaire se tasse. Manque de bol, la police les attend à l'aéroport et ils sont obligés de fuir. S'en suit une course-poursuite sans répit dans la nuit.
Le film sera exclusivement basé sur cette traque, proposant de suivre les cinq malfrats tentant de justifier leur larcin en se narrant réciproquement tous les petits désagréments que la vie a placé sur leur chemin respectif.
C'est là que le bât blesse. Chu Yuan dévie totalement de sa ligne de conduite initiale pour se réfugier dans une sorte d'étude psychologique redondante à la limite de la parodie. Poussée dans ses derniers retranchements par tout un tas d'artifices naïfs, l'étude psychologique en devient presque involontairement comique. L'idée en soit n'était pas mauvaise et peut faire penser à certains films noirs de la grande époque du film noir américain, mais Chu Yuan ne semble pas vouloir donner de profondeur à ses personnages et préfère s'enfermer dans une sorte de mélodrame larmoyant où chacun raconte ses petits malheurs. D'ailleurs c'est en ce sens que le film perd de son intérêt.
A part ça l'esthétisme kitsch cher au réalisateur de The Magic Blade est toujours de mise. Le film se déroulant exclusivement de nuit, les scénes nocturnes sont particulièrement réussies au niveau des éclairages notamment. Autre intérêt tendant à limiter la casse à défaut du casse qui lui est filmé assez mollement, les flash-backs qui jalonnent le film sont filmés avec une grande maîtrise. Proposant à chacun des protagonistes la narration des malheurs de leur existence les ayant poussé à commettre l'irréparable. On a d'ailleurs l'occasion de voir Chen Kuan-Tai, dans le rôle d'une ex-star de cinéma kung-fu déchue après un accident sur un tournage. On peut d'ailleurs entrapercevoir un extrait de Boxer from Shantung.
Au final, d'un film-noir à la profondeur psychologique, on passe à un mélodrame trop exacerbé et poussé dans ses derniers retranchements. Un film très décevant de la part du grand réalisateur de Killer Clans et Jade Tiger. Intéressant esthétiquement et pour sa distribution, mais très en-deça des attentes que laissait présager le concept de départ.