A la vie, à la mort
Rithy Panh continue son exploration de la difficile période du règne des khmères rouges en confrontant cette fois directement l'homme, tant de fois accablé dans ses précédents travaux et documentaires: Duch, premier dirigeant de l'organisation Khmère Rouge, tortionnaire et coupable de la mort de plus d'un million de gens. Un film sélectionné à la dernière minute dans l'une des sections parallèles du Festival de cannes 2011 en raison du (ridicule) procès toujours à l'heure actuelle pour condamner ce militaire.
Loin de la poésie de ses dernières productions, c'est un simple témoignage de Duch, face caméra, que Panh recueille ici, comme si le réalisateur avait voulu signifier, que finalement les mots seuls de cet ancien tortionnaire suffisaient en eux-mêmes. Parfois, à des rares reprises, Panh se permet des photomontages en parallèle, des morts, des rues désertes, des massacres, des conséquences de cette courte, mais ô combien horrible page de l'Histoire.
C'est évidemment totalement affligeant, surtout quand Duch se lance dans ses visions totalement utopistes d'un régime impossible à appliquer, tenir et à guider un pays. C'est effroyable, quand il parle des femmes comme étant des "choses", qui ne devraient avoir le moindre égard et droit…et cela incite à la colère, voire la haine, quand il dit n'avoir été au courant de rien et que ces "quelques morts" étaient absolument nécessaires au grand changement du pays…La folie de cet homme se mesure finalement aux confidences, qu'il livre en toute impunité face à un homme qu'il sait être l'une des nombreuses victimes directes de ce régime et défenseur de toutes les injustices commises…
En même temps, cela n'apporte rien de bien fondamental à ce que Panh – ou d'autres – n'aient déjà maintes fois abordées auparavant. Evidemment, que cela constitue un parfait prolongement en donnant la parole aux bourreaux après avoir longuement interrogés les victimes et cette rencontre fait assurément partie du propre exorcisme de Panh dans sa reconstruction personnelle…En même temps, Duch ne répète ce qui a déjà été relayé maintes fois dans des livres d'histoires et des documentaires…et finalement l'on pourra trouver un bien meilleur intérêt à un documentaire comme "L'Important c'est de rester vivant" de Roshane Saidnatta, ancienne assistante réalisatrice de Panh sur "Un soir après la guerre" (et dont le nom a mystérieusement disparu du montage du film, quand Panh a appris, que la réalisatrice allait se mettre à son tour à réaliser des documentaires dans le même style que lui… …).
Bref, un témoignage très fort pour celui, qui ne connaîtra pas grand-chose à ce qui s'est passé; mais un travail moins impressionnant, pour celui, qui se sera déjà intéressé à Duch, lu et / ou vu des choses auparavant; voire même un travail moins intéressant dans la carrière de Rithy Panh lui-même.
Depuis, Panh a enchaîné par une fiction, prévue de sortir courant 2012.