Interview Andy On

Un entretien par François (20/10/2003)
Transcription et traduction par Julien, Xia Bing, François et Vincent
Après avoir eu la lourde tâche de remplacer Jet Li en tant que Black Mask, puis d'être Mr Parfait pour Ringo Lam, Andy On est maintenant à l'affiche face à Vanness Wu dans le Star Runner de Daniel Lee et affrontera son idôle Jackie Chan dans New Police Story. Avouons que c'est un début de carrière très honnête. François a pu s'entretenir avec ce jeune acteur aussi modeste que sympathique.

Ses débuts
Star Runner
Et ensuite?

 

 


François: Pourriez-vous vous présenter et nous dire quel a été votre parcours avant Black Mask 2 ?

Andy: Je m’appelle Andy On, je suis né le 11 Mai 1977, je suis donc Taureau. Avant Black Mask 2, je tenais le bar d’un restaurant branché de Rhode Island. J’ai travaillé là bas pendant près de 4 mois et un jour, un client m’a dit comme ça« Vous devriez faire du cinéma ». Sur le coup, j’étais assez flatté et j’y ai réfléchi. Je me suis dit « Pourquoi pas, allons-y ! ». En plus à l’époque, mon patron était un sale c…, vraiment pas quelqu’un de bien alors j’ai quitté mon travail et je suis parti pour l’Asie.

F: Comment en êtes-vous arrivé à avoir un rôle dans Black Mask 2?

A: Tout est arrivé très vite…Tout ce que je peux dire, c’est que j’ai été très chanceux. J’ai été au bon endroit au bon moment. En fait, le film était déjà prévu avant que je rencontre Chinastar, et l’acteur qu’ils comptaient utiliser devait être trop occupé ou n’avait pas le temps de faire ce film. Quand je les ai rencontrés, ils m’ont vu et ils se sont dit « Ce type ressemble à Black Mask ».

Donc j’ai eu beaucoup de chance d’avoir ce rôle en fait.

F: N’était-ce pas difficile de remplacer Jet Li ? Vous savez, pas de Jet Li mais Andy On, « Qui c'est ce type ? » Le public attendait tout de même beaucoup de vous.

A: Vous savez, je ne m'en suis rendu compte qu'après le film. J'étais un fan de Jackie Chan depuis ma prime jeunesse. Durant mon enfance aux Etats-Unis, il n'y avait pas tellement d'asiatiques autour de moi donc il m'était difficile de voir beaucoup de films chinois. Les seuls que je connaissais étaient ceux de Jackie Chan donc quand on m'a dit que j'allais faire Black Mask 2 et succéder à Jet Li, tout ce que je savais de lui, c'est qu'il était une immense star des films de kung fu. Par conséquent, oui, j'étais forcément un peu nerveux puisque Jet Li a pratiqué le kung fu depuis son enfance alors que moi, à la même période, le seul moyen que j'avais d'apprendre le kung fu était de regarder les films de Jackie Chan. Alors bien sûr les gens devaient avoir d'importantes attentes me concernant, mais je pense que j'ai fait de mon mieux pour être à la hauteur. Je pense de toute façon que personne ne peut être aussi bon que Jet Li.

F: N'était il pas compliqué de se battre dans le film contre des lutteurs professionnels ? J'imagine que vous n'avez pas les mêmes aptitudes au combat que ces gens là... A-t-il été difficile de confronter les deux styles ?

A: En fait ça ne l'a pas été du tout. Je ne dirais pas que ça a été difficile, c'était même plutôt amusant. J'aime me battre depuis que je suis petit et je connais bien les catcheurs professionnels. Mais bien sûr ils étaient nettement plus lourds et plus grands que moi donc j'ai eu de la chance qu'ils aient été si gentils avec moi (rires), ils ne m'ont pas trop jeté dans tous les sens. Nous devions nous adapter les uns aux autres en fait parce qu'on devait se battre et je devais faire mon job, ce n'était pas du kung fu trop rapide mais pas ridicule non plus. Je pense que ce que nous avons fait était globalement bon.

F: Parlons des effets spéciaux. Comment était-ce de travailler avec des câbles et les CGI ?

A: Il n'y a pas eu de problème avec les CGI. Par contre je n'avais jamais utilisé de câbles auparavant et c'était dur au début parce que cela ne permet pas d'avoir le contrôle de son corps. C'est la câble qui contrôle, ça te soulève et tu dois faire avec. Au début cela n'a pas été facile du tout, je n'aimais pas mettre le harnais pour être ensuite secoué dans tous les sens. Mais une fois que tu as été en l'air une centaine de fois, tu t'habitues et je dirais même que maintenant, je me débrouille plutôt bien.

F: Avez vous suivi une quelconque forme d'entraînement avant le film avec Yuen Woo-Ping et les cascadeurs ?

A: Oui, on m'a envoyé un mois au Temple Shaolin pour y apprendre les fondamentaux. Je me suis beaucoup étiré et je suis devenu plus agile. J'y ai aussi appris un peu de wu-shu, mais en fait c'était surtout du stretching parce que je manquait vraiment de souplesse. Après un mois à ce régime là, je suis revenu ici et j'ai pris des leçons avec Yuen Woo-Ping pour préparer le film.

F: Mais avant Black Mask 2 quelle était votre expérience des arts martiaux ?

A: Avant ? Juste ce que j'ai fait à Shaolin, je n'ai jamais pris de cours de kung fu ou d'un quelconque art martial. Tout ce que j'ai appris me vient de ce que je regardais à la télévision. Tout seul.

F: Vraiment ?! Dans Black Mask 2 et Looking for Mr Perfect vous avez l'air d'un véritable artiste martial.

A: Je vous ai eu les gars ! (rires) Quand j'étais enfant, j'étais un tel fan de Jackie Chan et son style qu'à chaque fois que je voyais un de ses films, je sortais à la fin pour sauter et donner des coups de pied. J'ai des cicatrices sur tout le corps qui datent de ces « après-films ». Au point que ma grand-mère m'interdisait de regarder ces films. Mais il me fallait voir ces films! En cachette...(il sourit)

F: Toujours au sujet de Black Mask 2, il y a des rumeurs au sujet d'une version beaucoup plus longue. L'avez vous vue ?

A: J'ai vu le premier montage. C'était vraiment long. Je ne pense qu'un film de trois heures a sa place dans les cinémas. C'était bien évidemment beaucoup trop long et j'imagine qu'ils ont donc enlevé beaucoup de choses pour rendre le film meilleur. Mais le studio et le réalisateur n'ont pas arrêté de se disputer à ce sujet.

F: Et comment est ce que cela a été de travailler avec Tsui Hark ? C'est un réalisateur on ne peut plus réputé...

A: C'est vraiment quelqu'un d'unique, j'ai beaucoup aimé travailler avec lui. C'est en fait le premier réalisateur avec qui j'ai travaillé donc j'ai beaucoup appris de lui. J'ai bon espoir de collaborer à nouveau avec lui un jour.

Andy On et Hsu Chi
dans Looking for Mr Perfect

F: A présent, à propos de Looking for Mr Perfect, le réalisateur est très connu pour ses drames et films sombres alors que dans ce cas il s'agit d'un film « vacancier ». Comment vous a-t-il présenté ce projet ?

A: Après le tournage de Black Mask 2, j'ai commencé à devenir plus familier des réalisateurs asiatiques et leur façon de travailler, et j'ai donc découvert tout le talent que déployait en général Ring Lam pour ses films sombres. Mais pour le coup, on m'a prévenu que c'était la première fois qu'il s'essayait à la comédie d'action. Il m'a dit qu'il attendait de moi que je joue la partie « action » tandis que les autres acteurs s'occupaient de l'aspect « comédie ». C'était donc un bon mélange et je n'ai fait que mon travail.

F: A l'opposé de Black Mask 2, ce film vous confrontait à des acteurs expérimentés tels Simon Yam, Hsu Chi, Hiu Siu-Hung... Etait-ce stressant pour vous de jouer avec des acteurs aussi connus et expérimentés ?

A: Oui, j'étais très très nerveux je me sentais comme un fan face à son idole. Mais en fait ils m'ont surtout aidé parce que je n'avais aucune experience du jeu. Quand vous travaillez avec de si bons acteurs, ils vous amènent à donner le meilleur de vous même. J'ai eu beaucoup de chance de jouer avec Hsu Chi, Simon et tous les autres, ils m'ont vraiment beaucoup aidé.

F: Les scènes de combat sont assez intéressantes dans le film, il n'y a pas que de la bagarre, aussi beaucoup d'humour et particulièrement quand vous vous battez contre Simon Yam. Etait-ce facile pour vous de répondre à la fois à l'exigence de se battre et celle de s'amuser dans le même temps ?

A: Très facile. Il était vraiment agréable de travailler avec Simon et tous les autres. En fait, je ne savais pas que je faisais de la comédie avant de le retrouver en plein combat contre Simon, il n'arrêtait de déconner et je devais vraiment me battre avec lui. Mais en fait, je réagissais et je jouais en fonction de lui, ce qui m'a amené à faire de la comédie sans même m'en rendre compte. Tout le talent de Simon est là.

 
F: Comment avez vous rencontré Daniel Lee et avez vous intégré le projet Star Runner ?

A: En fait, j'ai entendu dire que le projet était en développement depuis un certain temps et qu'il avait été plus ou moins retardé, j'imagine qu'ils n'avaient pas trouvé les bonnes personnes pour interpréter les personnages. Ils ont fini par trouver des acteurs pour tous les personnages, sauf un, le mien, Tank. Je pense qu'ils n'ont pas su trouver quelqu'un d'autre et que c'est pour cela qu'ils se sont finalement adressés à moi.Vous auriez vu l'expression du visage du réalisateur quand il m'a vu, quelque chose comme « C'est lui que je veux! ». J'étais aussi très excité car j'avais lu le script, le personnage m'avait plu et c'était vraiment ce que je voulais jouer.

F: Pouvez nous en dire un peu plus sur ce personnage ?

A: Tank est sans aucun doute le meilleur personnage que j'ai eu à jouer jusqu'à aujourd'hui.C'est en fait un pratiquant de Boxe Thaï très connu comme tout le monde rêverait d'être. Dans l'histoire, Tank est très dur vu de l'extérieur, alors que face à son frère, il est comme un enfant. Mais quand il se bat, il est tout simplement féroce. Tank et son frère entretiennent donc des rapports d'amour-haine qui sont au centre du film. En fait, après que Daniel Lee m'a rencontré, il a ajouté des scènes suplémentaires pour ce personnage. Donc ce sera vraiment intéressant, le duo Vanness Wu et Andy On dans Star Runner.

Vanness Wu et Andy On dans Star Runner

F: Donc ce n'est pas qu'un film de combat ?

A: En fait le film parle de tout. C'est quelque chose que j'avais envie de faire depuis longtemps, il vous donne envie de vous battre, de rire, il y a beaucoup de scènes touchantes, beaucoup d'éléments pour faire un bon film je pense.

F: Vous jouer un personnage qui pratique la Boxe Thaï. C'est encore une fois un nouveau style pour vous. Avez vous dû subir un entraînement spécial pour faire ce film ?

A: Oui, avant de tourner le film, je me suis entrainé au Billy Chow's Thaï Boxing Gym de Hong Kong pendant un peu plus d'un mois. Je ne peux que le remercier pour ce qu'il m'a appris, j'ai passé de très bon moments là bas.

F: La Boxe Thaï est connue comme un art martial vraiment dur et le trailer est plutôt violent c'est plus du « rentre dedans » que de magnifiques chorégraphies. Qu'est-ce qui a été difficile sur le tournage ?

A: Ca a été très « brut ». Le réalisateur voulait un style de combat plutôt réaliste, pas quelque chose qui ait l'air chorégraphié. Il ne voulait pas qu'on voit que ça l'était. Donc c'est dans cette perspective que nous avons fait le film, nous devions nous battre comme l'auraient fait de vrais boxeurs. Nous avons regardé un certain nombre de vidéos de boxe et de K1 ce qui nous a beaucoup appris. Ce que j'aime dans ce film c'est qu'il est vraiment brut, j'ai pris beaucoup de coups, j'en ai donné aussi pas mal. Mais c'est vraiment un bien en soi parce que quand on voit quelqu'un prendre un coup, on se dit « Waouh, les chorégraphies ! », mais en fait on a juste pris un vrai coup ! (rires) J'ai beaucoup de cicatrices et tout, mais ce n'est pas grave, c'est ce que j'aime, j'aime que les films d'action soient comme ça, vraiment réalistes.

F: Vous travaillez en ce moment sur le nouveau film de Jackie Chan (New Police Story), n'est-ce pas ? Vous jouez un « bad guy » avec Daniel Wu ?

A: Oui ! Il joue le chef d'une bande dont mon personnage est l'un des membres. Ce film c'est un rêve qui devient réalité parce que Jackie Chan, c'est mon idole de toujours, même quand j'étais tout petit je regardais ses films et maintenant je m'apprête à tourner avec lui! On aurait pu me donner un rôle de figurant, ça aurait suffit à mon bonheur. Et là je vais carrément me battre avec lui.

F: Donc vous allez avoir un combat ensemble ? Est ce que vous l'avez déjà tourné ou est ce que c'est pour bientôt ?

A: Non, ce n'est pas encore fait et j'ai vraiment hâte. Je me suis entrainé très dur dans cette perspective, je vais faire un peu de muscu le matin et je fais quelques rounds le soir, pour me préparer juste pour lui. Je sais qu'il est fort.

F: Vous travaillez en ce moment avec Jackie Chan après avoir collaboré avec des gens comme Tsui Hark, Ringo Lam, Simon Yam, Daniel Lee... Quel regard portez vous sur votre début de carrière ? Après avoir travaillé dans un restaurant pour un abruti, vous tournez actuellement avec Jackie Chan...

E: Oui, c'est vraiment un rêve qui devient réalité. Je pourrais retourner dans ce restaurant et me moquer de lui... (rires) Je plaisante. Je suis vraiment reconnaissant, il y a tellement de gens que je devrais remercier, je pourrais commencer et continuer, continuer... La seule chose que je peux faire en retour, c'est donner le meilleur de moi même.

F: Avez vous déjà d'autres projets après Police Story ?

A: Pour l'instant, je ne sais pas encore. Après le tournage du film de Jackie, on entamera la promotion de Star Runner et ensuite, en Décembre, je voudrais retourner aux USA pour Noël, ça fait bien longtemps que je n'y étais plus.

F: Ces dernières années, il n'y a pas vraiment eu beaucoup de films d'arts-martiaux en Asie, mais depuis quelque temps, il semble qu'on assiste à une petit retour en grâce du genre. Pensez vous avoir là une opportunité de devenir une vraie star du film d'art martiaux ou vous ne souhaitez qu'être un acteur ?

A: J'ai envie d'essayer différents rôles, c'est la variété qui me fait avancer. Pour l'instant je me focalise sur les films d'action en général, pas seulement les films d'arts-martiaux. Quand on y réfléchit, les arts martiaux, ce n'est jamais que du combat. J'aime les films d'action. Jackie fait des cascades, il utilise des armes à feu, il se bat... C'est ça l'action, c'est ce que je veux faire. C'est une chance qu'il y ait nouveau de la place pour les films d'action au cinéma; c'est je crois une opportunité pour moi de montrer ce dont je suis capable.

F: Donc vous envisagez votre carrière avant tout comme un acteur de films d'action ?

A: Oui, c'est vraiment ce sur quoi je me concentre pour le moment, tout simplement parce que c'est ce pour quoi je suis le meilleur. Ainsi je continuerai d'apprendre et d'emmagasiner de l'expérience.

F: Et quand vous aurez autant de fractures que Jackie, vous pourrez envisager de passer à des films plus dramatiques ? : )
A: J'espère que je n'aurai pas de fractures ! (rires) Je ne veux pas me donner autant que Jackie, j'aime faire les cascades, mais je fais toujours attention à ce que je fais. Si je ne me sens pas capable d'accomplire ce que l'on me demande, je le dis au réalisateur. Mais j'ai quand même un minimum de capacités, si vous me demandez de sauter du deuxième étage d'un immeuble, je le ferais, si vous me demandez de sauter du troisième j'y réfléchirais (sourire).
F: Si vous en êtes-là aujourd'hui, c'est visiblement en grande partie grâce à Jackie Chan, non ?

A: Oui. Les cascades qu'il a pu faire sont époustouflantes. Et je suis sûr que je ne suis pas le seul à pouvoir dire une telle chose. Ce qu'il a fait, c'est carrément « Waouh ! ». Et c'est ce qui m'a donné envie de faire des films d'action, je voulais marcher dans ses pas.

F: Merci Andy et Bonne Chance !

A: Merci beaucoup à vous.

Tous nos remerciements à Mell et Ann pour leur aide précieuse, ainsi qu'à Andy On pour sa disponibilité et sa gentillesse, Marc et Nassim pour les captures vidéo.
date
  • octobre 2003
crédits
Interviews